Par un arrêt du 30 juin 2016, la deuxième chambre civile de la
Cour de cassation est venue préciser que, dans le cadre d’un contrat d’assurance, une fausse déclaration intentionnelle de l’assuré intervenant au cours du contrat devait entraîner sa nullité (
2e Civ., 30 juin 2016, pourvoi n°15-18.855 et n°15-19.772, à paraître au bulletin).
Une femme souscrit un contrat d’assurance automobile. Au cours de l’exécution de ce contrat, elle déclare à l’assureur que son fils est le conducteur secondaire du véhicule assuré. Ce dernier a un accident de la circulation. A la suite de la déclaration de sinistre émanant de la souscriptrice, l’assurance refuse de l’indemniser arguant d’une fausse déclaration intentionnelle de sa part. En effet, alors qu’elle avait déclaré son fils comme étant conducteur secondaire du véhicule, ce dernier en était en vérité le conducteur principal.
Ce litige s’inscrit dans la jurisprudence abondante qui entoure l’interprétation de l’article L-113-8 du code des assurances, lequel prévoit que «
(…) le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré ».
Comme nous l’expliquions dans notre
article du 10 février 2014, la chambre mixte a tranché, dans un arrêt du 7 février 2014,
une controverse entre la deuxième chambre civile et la chambre criminelle[S1] , en affirmant que l’assureur ne pouvait se prévaloir de la fausse déclaration intentionnelle de l’assuré que pour autant qu’elle émanait des réponses aux questions précises posées par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration de risque (
ch. mixte, 7 février 2014, pourvoi n°12-85.107, Bull. 2014, Chambre mixte, n° 1).
Cette solution, reprise postérieurement par la haute
juridiction (
Crim., 18 mars 2014, pourvoi n°12-87.195, Bull. criminel 2014, n° 82 ;
2e Civ., 3 juillet 2014, pourvoi n° 13-18.760, Bull. 2014, II, n° 166) laissait à penser que les déclarations mensongères ne seraient appréciées qu’à l’aune des réponses données par l’assuré sur la base du questionnaire préalable à la conclusion du contrat.
C’est la raison pour laquelle le pourvoi tendait à ce que la
cour de cassation réitère la position de principe issue de l’arrêt du 7 février 2014. Néanmoins, entre temps, les juges du quai de l’horloge s’étaient efforcés de la concilier avec la jurisprudence antérieure à l’arrêt de chambre mixte et avaient alors durci leur position à l’égard des assurés. A ainsi été jugé que «
le juge peut prendre en compte, pour apprécier l’existence d’une fausse déclaration, les déclarations faites par l’assuré à sa seule initiative lors de la conclusion du contrat » (
2e Civ., 4 février 2016, pourvoi n°15-13.850, à paraître au bulletin ;
2e Civ., 19 février 2009, pourvoi n°07-21.655, Bull. 2009, II, n°48). Un mois après, la deuxième chambre civile a estimé qu’en présence d’une telle déclaration spontanée, le juge n’avait pas à rechercher si cette dernière procédait d’une réponse à des questions précises posées par l’assureur (2
e Civ., 3 mars 2016, pourvoi n°15-13.500,
à paraître au bulletin).
Incontestablement, l’arrêt du 30 juin 2016 se situe dans la continuité de décisions défavorables aux souscripteurs d’assurance. Cependant, la particularité de l’espèce tenait à ce que la fausse déclaration intentionnelle était intervenue en cours de contrat. La
cour de cassation décide alors que la cour d’appel n’avait pas à rechercher si cette déclaration spontanée procédait d’une réponse à une question précise posée par l’assureur, ni même si elle avait été précédée d’une fausse déclaration au moment de la souscription du contrat.
Autrement dit, l’existence d’une déclaration spontanée mensongère, laquelle peut conduire à la nullité du contrat d’assurance, ne s’apprécie pas uniquement à la date de souscription du contrat. Cette déclaration peut intervenir en cours de contrat et emporter les mêmes conséquences.
Guillaume Leroy (stagiaire) et
Catherine Bauer-Violas