31 octobre 2013 - Quel recours contre une ordonnance du conseiller de la mise en état statuant sur une fin de non-recevoir ? - Sophie Mahé

*Mise à jour du 18 août 2017 : vous trouverez en cliquant sur ce lien un article consacré à la réforme du conseiller de la mise en état opérée par décret du 6 mai 2017

Aux termes de l’article 914 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue des décrets n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 et n° 2010-1647 du 28 décembre 2010, applicables aux appels formés après le 1er janvier 2011,
« Le conseiller de la mise en état est, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, seul compétent […] pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel […]. Les parties ne sont plus recevables à invoquer la caducité ou l'irrecevabilité après son dessaisissement, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement.
Les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel […] ont autorité de la chose jugée au principal ».

Selon l’article 916 du même code,
« Les ordonnances du conseiller de la mise en état ne sont susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond.
Toutefois, elles peuvent être déférées par simple requête à la cour dans les quinze jours de leur date […] lorsqu'elles statuent sur […] la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel […] ».

Une affaire a donné récemment à la Cour de cassation l’occasion de faire application de ces nouvelles dispositions.

Dans celle-ci, un conseiller de la mise en état, saisi d’une fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel, avait rejeté celle-ci et déclaré l’appel recevable. L’intimé n’avait pas cru devoir déférer cette ordonnance à la cour d’appel, mais avait réitéré sa contestation devant la formation collégiale de la cour d’appel, laquelle l’avait rejetée, comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée attachée à l’ordonnance du conseiller de la mise en état.
Saisie d’un pourvoi formé tant contre l’arrêt au fond, que contre l’ordonnance du conseiller de la mise en état, la Cour de cassation a déclaré ce dernier irrecevable :

« Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles 914, alinéa 2, et 916, alinéa 2, du code de procédure civile, en leur rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 2011, que les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ont autorité de chose jugée au principal et, en ce cas, peuvent être déférées par simple requête à la cour d'appel dans les quinze jours de leur date ; que l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 25 mars 2011, qui statue sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel formée par la SCI de Strasbourg et est revêtue de l'autorité de la chose jugée, est devenue irrévocable ; que, dès lors, le pourvoi, fût-il formé avec celui dirigé contre l'arrêt au fond, est irrecevable » (1e Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.939, Bull. 2013, I, n° 71).

La Cour de cassation a également rejeté le pourvoi dirigé contre l’arrêt au fond.

Pour bien comprendre la portée de cet arrêt, il est nécessaire de rappeler qu’antérieurement à la réforme de la procédure d’appel issue des décrets des 9 décembre 2009 et 28 décembre 2010, la jurisprudence était fixée en ce sens que seules avaient autorité de la chose jugée au principal, les ordonnances du conseiller de la mise en état qui, appelées à trancher une constatation relative à la recevabilité de l’appel, avaient mis fin à l’instance (2e Civ., 13 mars 2008, pourvoi n° 07-11.384, Bull. 2008, II, n° 68).
En revanche, la Haute Juridiction décidait que les ordonnances du conseiller de la mise en état déclarant l’appel recevable étaient dépourvues de l’autorité de la chose jugée au principal.
De telles ordonnances n’étaient pas susceptibles d’être déférées à la cour d’appel (Avis de la Cour de cassation, 2 avril 2007, pourvoi n° 07-00.006, Bull. 2007, Avis, n° 5) et les moyens tirés de l’irrecevabilité de l’appel qui avaient été écartés par le conseiller de la mise en état, pouvaient être soutenus à nouveau devant la formation collégiale de la cour d’appel, laquelle était alors tenue de statuer (Com., 12 juillet 2004, pourvoi n° 03-12.672, Bull. 2004, IV, n° 161 ; 2e Civ., 18 décembre 2008, pourvoi n° 07-20.599, Bull. 2008, II, n° 276 ; Com., 4 octobre 2011, pourvoi n° 10-15.404).

Désormais, les ordonnances du conseiller de la mise en état déclarant l’appel recevable peuvent être déférées à la cour d’appel, ce dont il résulte qu’elles ne peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation, fût-il formé avec celui dirigé contre l’arrêt au fond. Le pourvoi n’est possible que contre l’arrêt de la cour d’appel statuant sur le recours ainsi organisé devant la juridiction collégiale, dans les conditions prévues par les articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile.
En outre, les fins de non-recevoir tendant à voir déclarer l’appel irrecevable, soumises au conseiller de la mise en état, ne peuvent plus être présentées à la cour d’appel statuant en formation collégiale, auraient-elles été rejetées par le conseiller de la mise en état.

Sophie Mahé